La théorie du rien, qui passe par le vide des fois
Hier, je me suis acheté des lunettes de soleil, les miennes étant cassées depuis 10 jours, je pouvais avec difficulté les supporter.
Ma situation financière actuelle est catastrophique, je prie au quotidien pour qu’aucun petit accident vienne troubler mon pénible effort de retour à la normale, qui si mes calculs sont bons, arrivera en février 2004.
Donc, depuis presque le mois de janvier où j’ai commencé à m’apercevoir que ma vie dépensière ne pouvait plus être menée comme ca, je n’ai pas vraiment eu l’occasion de pratiquer le rituel de plaisir moderne que constitue l’achat spontané et non justifié de truc qui fait plaisir.
Hier, j’ai vu des lunettes, j’ai vu leur prix (17 Euros), et j’ai pas pensé que c’était cher, ou pas cher, j’avais la necessité de les avoir (== déculpabilisation), j’ai donc choisi une des paires les plus « américain plein de cocaïne » (©tartofrez), et je les ai rajoutées sur le tapis roulant de la caisse de Carouf (oui à 17 Euros, ca ne peut être que des lunettes Carouf), on paye on range, et en arrivant à la voiture, j’avais un sentiment de légèreté que je n’avais pas remarqué de prime abord, et qui, je m’en apercu immédiatement, était dû à un retour à l’état d’homme presque riche, ou dumoins capable de se payer ce qu’il veut.
Evidemment, l’ombre au tableau est qu’en ressentant ce sentiment, je me suis senti bien futile, bien piètre, de ne finalement être heureux que lorsque je consomme, et je ne pensais pas cadrer si précisement avec le schéma social du français moyen …
Mon bonheur furtif fût donc eclipsé par la pensée que je n’étais finalement qu’un veule salarié qui refusait d’acheter des yahourts de marque de peur de ne pouvoir en acheter tout court le mois suivant, qui prenait un extrème plaisir à dépenser sans regarder la note ensuite.
Ce geste, si vous avez eu l’occasion de le faire, est d’un bonheur intense, et on ne s’en rend compte que lorsque on en est au stade de compter les centimes d’économie.